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21 novembre 2006




« Je suis bien persuadé qu’il y a en tout être humain un immense fond de créations et d’interprétations mentales de la plus haute valeur qui soit, et bien plus qu’il n’en faut pour susciter dans le domaine artistique une œuvre d’immense ampleur, si les circonstances, si les conditions extérieures viennent par hasard à se trouver réunies pour que cet individu s’éprenne d’œuvrer dans ce sens. Je crois fausses les idées, cependant fort répandues, et selon lesquelles de rares hommes, marqués par le destin, auraient le privilège d’un monde intérieur, qui vaille la peine de l’extérioriser. Ce n’est pas le pouvoir d’invention personnelle qui manque : il est la denrée la plus répandue du monde partout où il y a de l’homme. Ce qui manque à chacun qui veut faire de l’art, c’est premièrement d’y faire appel ; c’est en second lieu de savoir disposer les voies pour qu’il se manifeste sans réfraction. Ce n’est pas la musique, qui manque jamais ou qui n’est pas bonne, c’est la flûte. »

Jean Dubuffet, L’homme du commun à l’ouvrage, Gallimard, Paris, 1975, pp.98-99.

Suffit-il, pour être artiste, de le vouloir ? (sujet 2004)

Suffit-il (de vouloir) > quelles sont les autres possibilités ?

Etre artiste ?

Le vouloir > qu’est-ce que c’est, le vouloir ?

L’art est une question. Qui n’attend pas de réponse. L’art est la mutation d’une question en paysage interne. Paysage interne trop envahissant, qui finit par être projeté à l’extérieur. L’art n’est pourtant pas une thérapie. Il ne cherche à guérir de rien. Il pose une question confuse, qui trouvera sa place en chaque être, qui en fera à son tour son paysage interne. C’est une transmission d’histoire sans mots.

L’art est une question faite par des mains qui se foutent des réponses. Des mains dont le seul rôle est de poser des questions. Pas autre chose. La réponse, c’est pour les idiots. Formuler la question, voilà qui est intéressant. Formuler une question qui n’est absolument pas dans le registre habituel des questions, qui ne contamine rien, qui n’étiquette rien, une question qu’à la limite, on ne peut même pas déchiffrer. Une question qui est soumise à la libre interprétation, une question qui n’en est pas une. Une question, qui suggère d’autres questions. Une fausse question. L’art est une fausse question.

Mais l’art est évidemment une question interne, personnelle et profonde, à l’origine. Je pensais toujours, que c’était une vengeance. La mise en œuvre d’une survie, soit d’une vengeance sur ce qui vous voulait mort, de manière générale, alors oui c’est une vengeance, un pied de nez à la mort, mais ça reste cet immense questionnement : pourquoi suis-je resté en vie, pourquoi le resterai-je, pourquoi vous l’êtes, vous, et qui êtes-vous. L’art part d’un ingrédient, d’une histoire, d’un petit secret, puis s’étend comme une tumeur. « Vouloir être artiste » ? la pire des supercheries. Vouloir être artiste serait obéir à un phantasme interne. On ne veut pas, on est ou pas, ça vous est nécessaire ou pas.

Suffit-il, pour être artiste de le vouloir ?
Suffit-il d’être artiste pour le vouloir ? serait une meilleure formulation.

Prochain sujet : qu’est-ce qu’un artiste.

La question fondamentale contenue dans ce sujet : « mais pourquoi vouloir être artiste ? » Cette question contient la réponse au sujet.

Le sujet s’annule.
Vouloir être artiste est vouloir devenir une simple fonction, un bibelot.
Le sujet s’annule.


Vouloir être artiste, quelle connerie. Ça s’accompagne de prétention en général, on y décèle une profonde fermeture à l’autre. Une espèce de snobisme, de mépris. Pour ce petit être qu’on refuse d’être : soi-même, vérité profonde, dans toute sa laideur, que cherche à recouvrir la peau de l’artiste, au contraire, et en général. C’est systématique dans le vouloir-être-artiste.

Conneries.

Chercher à vouloir être quelque-chose, c’est inévitablement chercher à endosser un costume, pour ressembler à tout ce qu’on n’est pas. Mécanisme profondément opposé à la raison de vivre centrale de l’artiste ; retrouver le pays qu’il est, retrouver une couleur. Etre surtout lui-même, plus fort que tout, plus fort que les opinions.

Le sujet s’annule donc.

Vous bénéficiez de 6 heures pour me remettre cette dissertation. Et puis vous aurez l’agrégation. Peut-être. Il faut encore passer à l’oral, c'est-à-dire avoir quelques relations dans le jury.

Nous nous sommes bien amusés. En tant que sceptiques décérébrés.

... invidé par estragon à 22:47




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